Dans l'écheveau tortueux des rues de New York, où les néons vacillants projetaient des éclats de lumière dans l'obscurité, Eve avançait avec une grâce féline, ses cheveux bleu turquoise semblant capturer les reflets de la ville qui ne dort jamais. Chaque pas résonnait dans l'air chargé d'électricité, tandis que son regard scrutait les recoins sombres avec une vigilance aiguë.

Les rues étaient un ballet tumultueux de voix discordantes, de klaxons stridents et de cris étouffés, une cacophonie urbaine qui semblait résonner jusqu'aux confins de l'univers. Mais au milieu de ce chaos, Eve trouvait une harmonie étrange, une symphonie chaotique qui semblait battre au rythme même de son cœur.

Soudain, un bruit sourd déchira l'air, faisant sursauter Eve dans la semi-obscurité. Instinctivement, elle se fondit dans l'ombre d'un bâtiment abandonné, son souffle suspendu dans l'attente de ce qui allait suivre. Les secondes s'étirèrent comme des élastiques tendus à leur limite, le silence oppressant enveloppant la ville d'un voile d'incertitude.

Puis, comme une brise légère après la tempête, le calme revint, laissant Eve se baigner dans la quiétude troublante de la nuit. Un sourire en coin étira ses lèvres, un éclat d'excitation dans ses yeux. Car c'était dans ces moments de suspense, où le monde retenait son souffle, que l'âme de New York se révélait dans toute sa splendeur et sa complexité.

Dans les rues de la mégapole, où chaque coin d'ombre recelait une histoire et chaque bruit portait une promesse, Eve se sentait vivante comme jamais. Car c'était là, au cœur de l'obscurité, qu'elle trouvait la véritable essence de la ville, une toile tissée de mystère et d'aventure, prête à être explorée par ceux qui osaient défier les ténèbres avec une audace inébranlable. Et dans cette nuit sans fin, Eve était prête à se laisser emporter par le tourbillon de l'imprévu, avec la certitude que chaque coin de rue dissimulait un trésor caché, attendant d'être découvert par ceux qui osaient rêver plus grand.

Son article bouleversa sa vie. Le danger la guettait à tous les coins de rues. Mais pouvait-elle décemment renoncer à ce qu’elle est ? Non. Ni même à sa liberté, celle de tous les jours qui lui permettait de se sentir vivante.
Dans le quartier de la résidence, on s’étonnait de la voir sortir, s’absenter parfois plusieurs jours. Elle assumait son désir ardent de continuer son enquête, de réunir les preuves qui feront tomber les véritables criminels !

Mais pas ce soir-là.
Aussi stupide soit-il, pour une personne dont la mort arrangerait plus d’un, elle désirait continuer à vivre normalement, s’acheter sa glace préféré ou une canette de café. Elle prenait les précautions nécessaires : les cheveux teints, une capuche rabattue sur son visage. Jusqu’à se rendre compte à destination, qu’aucune monnaie ne remplissait ses poches.

Voler ? Est-ce une possibilité envisageable ? Sa conscience bataillait quand étrangement, la canette se retrouva entre ses mains. Malgré son désir ou sa soif, elle la reposa. La gorge serrée, les mains dans les poches. Son attitude dû paraître surprenante quand tout à coup, le vendeur sortit à sa suite, lui courant après pour réduire la distance entre eux.

Quand on est en cavale, la paranoïa devient notre pire allié.
Prise d’un élan de surprise, mêlé à la panique, Aisha fit ce qu’elle savait le mieux faire : s’enfuir. Se précipitant tête baissée à travers les ruelles mal éclairées, elle le distança à un certain prix. Avec une brutalité à lui laisser une sacrée bosse, son front rencontra un conteneur. Le bruit s’éleva, audible dans les alentours.

« Merde, merde, merde. »

Ses mains frottées son front, ses yeux demeuraient clos. Mais ses pieds continuaient d’avancer dans l’obscurité. Cette fois-ci, c’est un autre obstacle qu’elle rencontra : une jeune femme. Relevant la tête au dernier moment, elle réussit à éviter le choc et se rattrapa avec une surprenante aisance. Sa main droite se râpa douloureusement contre le mur.

« J’ai connu mieux… Je vous ai pas fait mal ? »

Mais sa capuche était tombée sur ses étroites épaules. Son visage se dévoilait partiellement dans la semi-obscurité à l’inconnu.

Dans le calme nocturne, le bruit amorti de pas précipités parvint aux oreilles d'Eve, mais trop tard pour qu'elle puisse éviter la collision imminente avec la femme qui se précipitait vers elle. Cependant, l'impact ne se produisit pas. La fugitive réussit à s'arrêter juste à temps, se rattrapant au mur avec une agilité féline. Malgré sa fuite silencieuse, Eve craignit qu'elle ne chute et, d'un geste léger, attrapa délicatement son poignet pour la maintenir debout. Ce qui la poussait à fuir ? L'instinct d'Eve, le voile habilement tiré sur son visage, et le sentiment général d'urgence qui imprégnait les rues de Brooklyn.

"Tout va bien ?" demanda Eve, prévoyant la réponse alors qu'elle sentait le pouls frénétique de la fugitive sous ses doigts, remarquant son visage légèrement rouge de l'effort de sa course. Il était étonnant de voir à quel point le corps humain pouvait parfois ressembler à une machine, avec ses réactions prévisibles et ses signes caractéristiques. La femme était belle, petite et élancée, avec une allure subtilement athlétique. Ses yeux étaient sombres, ses cheveux d'ébène, et sa peau d'une blancheur laiteuse. Une touche de rose électrique relevait ses lèvres et ses yeux. À côté d'elle, Eve semblait grande et plus robuste, plus masculine dans son apparence.

Ce visage lui était familier, comme si elle l'avait déjà vu quelque part, peut-être sur un avis de recherche, mais la dénonciation n'était pas dans sa nature. Elle offrit un sourire amical à la brune, cherchant à la rassurer.

"Non, non, vous ne m'avez même pas touchée..." avait-elle déclaré en relâchant sa prise sur le poignet de l'inconnue, la libérant de toute emprise pouvant la mettre mal à l'aise dans sa situation délicate.

"Cela ne me regarde pas mais..."commença-t-elle alors, cherchant ses mots avec précaution, désireuse d'exprimer sa compassion pour la détresse de cette femme sans empiéter sur son intimité. C'était là toute la subtilité quand on s'adressait à un être humain et non à une machine, chaque mot ou expression pouvait être sujet à interprétation. Elle opta donc pour une phrase simple, directe.

"Je peux vous aider ?" avait-elle finalement proposé, ses mots empreints d'une sincérité chaleureuse, offrant son soutien à une étrangère dans la nuit, une étoile fugace dans l'obscurité de leurs destins entrelacés.

« Je crois... Sa voix trahissait une pointe d’hésitation, après avoir écouté d’une seule oreille la question. »

Quand Aisha sentit le regard inconnu sur son visage, ses fins doigts se précipitèrent sur le haut de sa veste, pour en tirer à nouveau la capuche. Son identité voilée, elle soufflait. Apaisée, en sécurité. D’étrangers sentiments qui côtoyaient ses peurs, sa paranoïa excessive. Mais l’inconnue, à la première impression qu’elle lui fit, ne lui sembla pas dangereuse.

Parole de son instinct ! Elle assumait toujours qu’il était bon, qu’il ne lui faisait jamais défaut avec une certaine fierté… Or, la réalité montrait plutôt son côté hasardeux et l’étonnante capacité d’Aisha à s’enfuir des bourbiers. Une chance insolente qui lui ferait peut-être défaut un jour.

« Tant mieux ! »

Cette fois-ci, seulement, ses iris sombres tombaient sur son interlocutrice. Sa tête se relevait pour apercevoir une femme plus grande, plus imposante. Mais son charme n'en demeurait pas moins présent. Peut-être aurait-t-elle pu rester quelques secondes de plus à l’admirer… Sa question suffisait à la sortir de ses pensées.
Elle avait bon fond. Aisha en était désormais sûre car son avis sur une personne se prononçait toujours dans les premières secondes d’une rencontre.

Ses lèvres s’entrouvèrent pour indiquer une négation. Bien sûr que non, elle n’avait besoin de rien. Peut-être de retrouver son chemin, rentrer tranquillement au refuge. Son téléphone se présentait comme son meilleur allié. Nul doute qui suffirait à cette tâche. Ses mains tombèrent le long de ses hanches, tapotant les poches de son short.

Rien. Elle se tût brutalement alors que ses doigts s’enfonçaient entre les tissus mais l’appareil rectangulaire n’était plus présent. Ni à l’avant, ni à l’arrière. Là, le début des ennuis commençait. Car elle mettait tout dedans à travers d’innombrables fichiers audio qui dévoilaient ses recherches et quelques plans de ses prochaines cibles.

Il lui servait d’archives, à travers des fichiers cryptés par un hackeur de sa connaissance et de prise de contact pour ses informateurs. S’il ne serait pas réellement utile pour mettre la main sur elle, les données suffiraient à l’incriminer d’autant plus.

« En fait… Je veux bien un coup de main. J’ai fait tombé mon téléphone. »

Sa mine déconfite en disait bien long sur l’importance de son outil de travail. Des mois entiers perdus, si elle n'arrivait pas à mettre la main dessus.
Sans attendre de réelle réponse, Aisha commença à rebrousser chemin dans les ruelles. Si la supérette était encore loin, impossible de s’en approcher pour autant. Sa seule chance était de le trouver avant ou peut-être de compter sur sa nouvelle connaissance ?

Pour l’instant, elle fixait le sol, les yeux plissés dans l’obscurité.

Eve observa l'étrangère se dissimuler sous son voile d'anonymat, retrouvant ainsi le réconfort des ombres urbaines. Dans les rues de Brooklyn, se cacher était devenu un art de survie, une nécessité pour ceux qui redoutaient les regards scrutateurs et les griffes avides des chasseurs de primes numériques. Pour Eve, cette prudence évoquait à la fois une légitime prudence et une certaine innocence, car ceux qui préféraient se fondre dans l'ombre semblaient toujours avoir quelque chose à cacher, et donc à craindre. Mais Eve, épargnée par de telles situations jusqu'à présent, se gardait bien de porter un jugement.

Elle remarqua avec une certaine résignation que leur rencontre fugace de la soirée n'avait pas pour dessein de se prolonger, ni même de demeurer. Elle s'attendait à ce que l'inconnue se dissolve dans l'obscurité comme elle était apparue. Cependant, elle la vit soudainement s'agiter, fouillant frénétiquement ses poches à la recherche d'un objet aussi banal que vital : son téléphone portable. Probablement égaré lors de sa course effrénée.

Face à cette situation, l'étrangère sollicita l'aide d'Eve pour retrouver son précieux téléphone égaré. Pleine de la bienveillance et de la jovialité qui lui étaient coutumières, Eve accepta volontiers de se joindre à cette quête. Elles se mirent donc en marche, suivant les pas discrets de la fugitive à la recherche de l'objet perdu, mais en vain. Malgré leurs efforts, le téléphone demeurait introuvable, dissimulé dans les ténèbres de la nuit.

Cependant, Eve ne se laissa pas décourager, persévérant dans sa mission avec une détermination inébranlable. Finalement, elle suggéra : "N'existe-t-il aucun moyen de le localiser ? Une sonnerie, un signal lumineux peut-être ?"

orte de son expérience, Eve avait développé toute une panoplie de stratagèmes pour retrouver son propre appareil égaré, utilisant parfois sa montre connectée ou son cyberdeck pour le retrouver dans les dédales du quotidien chaotique.

Ainsi, malgré l'absence de réticence à se lancer dans la quête du téléphone portable disparu, Eve ne pouvait s'empêcher de se questionner sur la durée et l'étendue de la course qui avait précipité l'arrivée de l'inconnue à ses côtés, ni sur les raisons qui l'avaient poussée à fuir ainsi.

Parmi les débris jonchant le bitume, Eve se pencha pour saisir ce qu'elle avait cru être un téléphone, mais qui se révéla être un vieux morceau d'emballage collant. Avec une grimace de dégoût, elle repoussa le déchet et nettoya ses doigts avant de reprendre ses recherches.

La mission : Trouver le téléphone s’avéra être un échec cuisant. Dépitée, ses émotions se lisaient à travers ses lèvres crispées et ses mains enfoncées dans ses poches, comme dans une dernière chance. Mais elle était toujours aussi vide, désespérément désertée par l'appareil. Un soupir se fit audible ; son regard remonta vers l'inconnue, cette adorable personne qui lui prêtait main forte dans sa quête. Ses paroles faisaient sens. Des idées exceptionnels qu'elle mettrait en place... Dès qu'elle l'aurait retrouvé. Sa tête se tourna, fuyante. Et d'une petite voix, Aisha osa répondra :

« J'y ai jamais pensé... »

Vraiment, elle se promettait de mettre cette solution en place, si elle le retrouvait. Ou pire, si le changement s'avérait obligatoire.

Sur leur chemin, seule la mine dégoutée d'Eve à un papier collant, rendit le sourire de la journaliste qui pouffa son amusement. Sa main se plaqua sur sa bouche ; ses yeux rieurs en disaient tout de même long. Mais à force d'avancer, elles s'approchaient dangereusement de l'épicerie et d'une rue plus fréquentée où son identité pourrait vite être reconnue. Mais c'était la dernière destination, la dernière chance de retrouver le téléphone perdu. Un peu gênée d'avoir une telle demande, Aisha s'empressa de poser la question à Eve, tout de même.

« Pourrais-tu aller demander dans le magasin ? Je t'attends là ! »

Mais, avec une fugitive, les rebondissements sont nombreux. Une voix s'éleva, proche des deux femmes encore masquées dans la pénombre de la ruelle.

« T'es sûr que c'était Aisha Khan ? J'arrive pas à passer la sécurité mais on pourrait se faire un sacré paquet de pognon ! »

Merde.  « Merde ! » Les regards se tournèrent dans leur direction.

« Tu as entendu ?
- Ouais. »

Là, c'était clair : Aisha est dans la mouise. Dans un élan de courage, elle sortit de la pénombre pour arracher le téléphone à l'homme, à quelques pas. Quitte à être dans le pétrin, elle récupérait son bien ! Mais incapable d'abandonner l'âme généreuse qui l'avait aidé jusqu'ici, elle attrapa au retour la main d'Eve pour s'élancer dans la ruelle. L'innocente se retrouvait impliquer à son contact et embarquée dans la fuite des deux hommes.